En tant que fabuleux joueur et meneur de ce groupe (qui en doute encore ?), je vais commencer par vous livrer la raison de ma présence dans cette petite taverne albérienne où nous nous sommes rencontrés.
Bonne lecture.
"Je n’aurai jamais pensé remettre aussi tardivement les pieds en Remo. Je me tenais pourtant là, l’air hagard, à balayer des yeux les innombrables taudis composant la cité de Caliardo. Malgré le pacte militaire passé avec le Togarini censé (selon les autorités au pouvoir) ramener la prospérité dans le pays, la pauvreté est toujours aussi présente et la faim reste l’un des mots principaux auxquels ont affaire les habitants.
Au détour d’une rue couverte de boue et de gravier, je découvris le but de ma visite en ces lieux. La vieille bâtisse en bois paraissait voutée par les ans, des planches à moitié décrochées pendaient lamentablement sur ses flancs, laissant apparaître de temps à autre des bribes de l’intérieur. Ces trous étaient déjà une plaie à l’époque, formant des courants d’air glacés, mais les fonds misérables donc bénéficiait l’établissement ne permettaient pas de financer les réparations. La toiture était, elle aussi, dans un sale état et il était certain que si ma curiosité me poussait à entrer, je trouverai les mêmes seaux servant à recueillir l’eau des fuites qu’à l’époque.
Mon tout premier souvenir se situe dans cet orphelinat. Un souvenir tout bête dans lequel je tombe tout simplement de la planche qui me sert de lit. Je devais avoir environ trois ans et je n’ai donc aucun souvenir de mes parents. Martine, la gérante de l’établissement m’a raconté m’avoir trouvé devant sa porte, emmailloté dans un linge alors que je n’étais encore qu’un nourrisson. Une simple note m’accompagnait, disant que mes parents, originaire du Lucrécio avaient été obligé de me laisser dans cet endroit. Rien de plus. Même si mon cœur m’ordonne parfois de les haïr pour cela, je ne peux m’y résigner, pensant à chaque instant au malheur que l’abandon d’un enfant doit provoquer.
La porte n’était bien entendu pas fermée et elle grinça doucement lorsque je la poussai. Il devait être aux alentours de midi, cependant, le hall d’entrée était plongé dans une semi pénombre, les fenêtres recouvertes de crasse étant extrêmement petites à cause du coût du verre. Une épaisse couche de poussière recouvrait le sol et l’unique seau restant débordait à chaque goûte qui tentait de le remplir plus que sa contenance. L’endroit était manifestement désert. J’entrai lentement, évitant les trous dans le plancher causés par la moisissure du vieux bois, laissant les flashs du passé m’envahir et me ramener une vingtaine d’années en arrière.
Je me revoyais errer dans ces couloirs à la recherche d’une occupation ou d’un peu de nourriture afin de calmer mon estomac, observer le monde extérieur par un trou dans le mur situé exactement à ma hauteur ou encore attendre, aligné avec les autres qu’un couple de riches militaires stériles choisisse l’un d’entre nous afin d’en faire leur héritier. Ce dernier souvenir est le plus traumatisant à mes yeux, car le désir de sortir d’ici, de dormir dans un lit chaud et de manger à notre faim n’était réalisé que pour un seul d’entre nous à chaque couple et Brynn sait qu’ils n’étaient pas nombreux à passer cette porte.
Avec le recul, je me rends compte que je n’avais aucune chance d’être choisi, la sélection qu’effectuaient ces gens ne se portant que sur le physique. En effet, j’ai toujours eu un visage assez disgracieux (les choses ne se sont d’ailleurs pas améliorées avec les années et les nombreuses blessures mal soignées dont j’ai souffert) et une corpulence malingre que le jeûne n’arrangeait pas. Je ressentais à chacune de ces « épreuves » un immense chagrin, les couples passant devant moi sans même m’adresser plus qu’un rapide regard dédaigneux.
Martine était cependant toujours là pour nous consoler moi et les autres. Je souris en pensant à elle, revoyant en pensées le sourire chaleureux qu’elle affichait toujours et qui nous mettait un peu de baume au cœur. Malgré son âge assez avancé, elle faisait tout ce qui était possible afin d’améliorer ne serait-ce qu’un peu notre misérable existence et je la considère encore maintenant comme étant une mère pour moi.
Malgré cela, je partis à l’âge de douze ans, laissant derrière moi un vieux morceau de bois sur lequel j’avais maladroitement tracé au charbon quelques mots qu’elle m’avait appris à écrire afin de la remercier pour tout. Je n’avais aucune éducation, ni aucune formation dans aucun domaine me permettant de survivre dans le monde extérieur, mais j’étais cependant rapide et très habile de mes dix doigts et je pensais pouvoir trouver une tâche requérant ces talents. J’ai très vite déchanté après avoir compris que ces compétences ne m’obtiendraient aucun salaire honnête et je dus me résoudre à voler pour survivre. Vol à la tire, à l’étalage, petits cambriolages, je commençais à me débrouiller de mieux en mieux pour survivre, et si mes larcins touchaient au début des personnes au hasard, je me résolus à ne voler que les personnes qui profitaient visiblement de la corruption et de la misère locale afin de s’enrichir. Ces militaires et autres marchands sans scrupules faillirent me capturer ou m’abattre à plusieurs reprises, mais mes talents grandissant me permirent à chaque fois de m’en sortir sans trop de dommages.
Ces talents finirent par être remarqués par des membres des Loups de Givre, la pègre locale, qui vinrent me promettre monts et merveilles si je rejoignais leur « organisation ». De la nourriture, des vêtements propres, un coin moelleux où dormir au chaud, mes rêves étaient on ne peut plus simple à l’époque. Je voulais également gagner un peu d’argent à envoyer à l’orphelinat si cela était possible. J’acceptais donc leur proposition, persuadé que ce choix était le meilleur que je pouvais effectuer. En y repensant, ce fut certainement le cas car ils m’auraient sûrement tué si j’avais refusé.
Le QG n’était pas si mal et ils tinrent leurs promesses. Je découvris les joies de manger à ma faim en échange de mes talents qui se perfectionnèrent encore. De plus, mon jeune âge leur permettait de se servir de moi pour me faufiler dans de minuscules conduits qui me permirent d’effectuer des cambriolages toujours plus silencieusement et efficacement.
Mes exploits finirent par arriver jusqu’aux oreilles du chef de meute qui me convoqua à un entretient. Certains auraient été tétanisés par la peur, mais j’étais à l’époque un enfant sans peurs, ce qui, en y repensant pouvait se traduire par de la témérité. Je fis face à l’homme de plus de deux mètres de haut au visage couvert de cicatrices qui m’avait mandé et je compris pourquoi on lui donnait le nom d’Alpha. Il me toisa quelques temps, avant de s’adresser à moi.
« - On m’a beaucoup parlé de toi petit, tu peux devenir un atout pour notre organisation. J’ai une question pour toi, as-tu déjà tué ? »
La question me fit l’effet d’une gifle, me ramenant en une fraction de seconde à la réalité. Je faisais maintenant partie d’une bande de truands très organisés et maintenant que j’avais été remarqué comme ayant des capacités supérieures à la moyenne, j’allais devoir leur obéir, sans chance de retour en arrière. Je me rendis compte que malgré la dure vie que j’y menais, l’orphelinat me manquait et que plus jamais je ne pourrais retrouver la vie qui était la mienne avant ma fugue.
Sentant que mon silence commençait à agacer mon interlocuteur qui attendait ma réponse, je lui expliquais tout en essayant de minimiser mes talents qu’hormis des rats et des oiseaux, je n’avais jamais pris une vie.
« - Alors tu apprendras. » me dit-il avec un sourire carnassier laissant apparaître ses dents jaunes et crasseuses.
Et effectivement, j’appris. Après quelques essais à l’épée, l’homme qui me servait de maître d’armes m’apprit que j’étais une recrue totalement inutile et qu’il ne voulait plus jamais avoir affaire à moi. Il me renvoya alors vers le chef qui après m’avoir lancé un regard plein de mépris, me fit conduire auprès de quelqu’un d’un peu plus pédagogue.
C’est ainsi que je fis la connaissance de Plume, une talentueuse guerrière spécialisée dans l’art du combat à distance. Cette jeune femme d’une vingtaine d’année commençait à s’illustrer par ses talents dans la meute et l’alpha avait décidé que j’allais être son premier élève.
Ses longs cheveux blonds cascadaient sur ses tempes, soulignant les traits délicats de son visage et ses vêtements simples ne faisaient qu’accentuer la différence entre sa beauté et le cadre dans lequel elle se trouvait.
Je pris grand plaisir à apprendre avec elle et je me découvris des talents avec ces armes qui permettaient de tuer à distance, sans prendre trop de risques, tout en restant discret. L’arc permettait de plus de rester à distance de la mort, ce qui était selon elle important, surtout en début de carrière. Chacun de mes progrès était récompensé par un sourire qui ne manquait jamais de me mettre mal à l’aise.
Après quelques semaines d’entrainement, j’avais beaucoup progressé sur cible et l’alpha décida que, quitte à perdre mon temps à trop m’entrainer, autant que ce soit sur le terrain. Il me donna alors mon premier ordre d’assassinat : un petit marchand refusant de payer la protection de la horde devait servir d’exemple. Je devais de plus en profiter pour trouver chez lui des objets de valeur afin de rembourser diverses dettes qu’il ne pourrait plus rembourser dans ces conditions.
Plume vint me voir avant mon départ. Elle se baissa pour atteindre ma hauteur et plongea ses magnifiques yeux dans les miens.
« - Quand tu reviendra, tu seras devenu un homme. La mort est une expérience difficile, surtout la première fois, mais je sais que tu vas t’en sortir. Tâches de rester dans les ombres et de ne faire plus qu’un avec. Elles te protégeront »
Elle m’adressa ensuite un sourire chaleureux et me tendit son arc.
« - Tu sais que je tiens beaucoup à cette arme, alors tu as intérêt à revenir en un seul morceau pour me la rapporter. »
Je saisis l’arc rudimentaire, mais tout de même de bonne facture et, lui adressant un sourire qui faisait écho au clin d’œil qu’elle venait de m’adresser, je sortis du bâtiment, me précipitant vers mon destin.
Alpha m’avait donné jusqu’au lendemain soir pour accomplir ma basse besogne. Je décidais alors de me placer sur un bâtiment adjacent à la boutique de ma victime, afin de l’observer quelques temps pour choisir le meilleur moment avant de passer à l’action.
Je vis vivre plusieurs heures durant un homme simple, qui travaillait simplement et mon cœur se serra quand je repensai au funeste destin que je lui réservais. Je décidai alors de suivre les conseils de mon entraineuse et de faire le vide dans mon esprit, oubliant ma victime.
Quand vint la nuit, alors que les rues étaient totalement désertes, je saisis l’arc qui pendait dans mon dos, encochait une flèche et le bandais. Quand le marchand passa devant la fenêtre sans vitre, je laissai partir le projectile qui vint se ficher dans la gorge de ma victime, ce qui contint son râle d’agonie. Il tomba à la renverse, heureusement sans bruit.
Je me laissais tomber de mon perchoir et tel un charognard venant se nourrir sur un cadavre, j’entrais discrètement dans la bâtisse en ruine. Je fis vite, délestant le pauvre homme de sa bourse en me forçant à ne pas le regarder et fis le tour du magasin, cherchant de petits objets de valeur que je pourrai cacher facilement dans mes poches. Le cadavre resterait là, servant d’avertissement pour tous ceux qui auraient la mauvaise idée de se moquer des Loups de Givre. Mon œuvre étant accomplie ici, je repartis comme j’étais venu, me fondant dans les ombres.
Le retour à la Tanière se fit sans encombre et quand je passai la porte, je fus heureux de voir que Plume m’attendait.
« - Toutes mes félicitations, te voilà maintenant un loup parmi les loups. Après ceci, tu ne peux plus garder ton nom et la tâche de t’en trouver un nouveau m’incombe. » Elle se mit à marcher, pensive, puis elle s’exclama « A partir de maintenant, tu te nommeras Ark ! ».
Mon pied butta contre un débris de toit, me ramenant violemment à la réalité. Cependant, cela faisait longtemps que je ne m’étais pas ainsi abandonné à mes souvenirs. Je m’assis donc sur le lit que j’avais jadis occupé et qui était maintenant couvert de poussière avant de retourner explorer les méandres de mon passé.
Lors de mon épreuve initiatique, j’étais âgé d’environ quatorze ans, ce qui, dans ce milieu faisait quasiment de moi un homme. Plume continua à me former pendant encore quelques mois, son sourire et sa bonne humeur me permettant de tenir dans cet environnement menaçant. Mes talents d’assassin se développèrent et je finis par maîtriser parfaitement l’arc, tout en continuant à rester parmi les ombres en toutes circonstances.
Alpha me faisait de plus en plus confiance et me confiant des missions d’une importance toujours croissante, si bien que je finis par devenir au bout de quelques années l’un des membres d’élite de la meute. J’étais devenu l’égal de Plume et il nous arriva à maintes reprises de travailler ensemble, si bien qu’avec le temps, nous devinrent inséparables, sans que toutefois cela ne dépasse le stade de l’amitié, à mon grand regret.
A l’aube de mes dix-neuf ans, Alpha me convoqua pour me donner mon prochain travail. Je devais m’infiltrer dans la demeure d’un noble un peu trop curieux par rapport à notre organisation et le liquider, lui et lui seul, sans me faire repérer. Sa mort devait cependant servir d’avertissement pour les autres et je devais ensuite arranger son cadavre de façon impressionnante. Aucun objet, de quelque nature qu’il soit ne devait disparaître du manoir. C’était un assassinat et non un pillage. De plus, la sécurité avait été renforcée, le bougre étant du genre paranoïaque – à juste titre d’ailleurs – et pour maximiser ma discrétion, j’allais travailler seul.
Cette mission allait être un défi à la mesure de mon talent et je m’empressai de hocher la tête à chaque détail, l’impatience bouillonnant dans mon cœur de jeune homme.
Je sortais précipitamment du bureau – si on pouvait le qualifier ainsi – d’Alpha et partait préparer mon matériel. Le chef me donnait une semaine pour effectuer un repérage complet des lieux et des habitudes de la maisonnée et pour passer à l’acte.
Au moment de passer la porte de la Tanière, une voix me retint.
« - Alors, on ne dis même plus au revoir à sa partenaire ? »
Je me retournai, mon sourire faisant écho à celui de la femme pour qui mon cœur battait. Elle s’approcha, me serra dans ses bras et plongea ses yeux azurs dans les miens, ce qui me fis comme toujours frémir.
« - Sois prudent, Ark. » me dit-elle, la voix pleine d’angoisse.
Je lui promis de revenir en un seul morceau et avec un salut de la main, je sortis de la cache.
La demeure du noble se situait à l’autre bout de la ville, dans les quartiers riches qui paraissaient se moquer, du haut de leur colline, de la misère du reste du peuple. Je dus marcher pendant plusieurs heures parmi la foule, voyant peu à peu les gens autour de moi se modifier, passant du mendiant affamé aux os saillants qui cherchait désespérément de quoi survivre au riche marchand couvert d’or qui, rien que par son air ravi donnait envie de lui trancher la gorge avant d’abandonner sa bourse rebondie en plein milieu d’une ruelle défavorisée.
Je passai outre, laissant cependant mes mains habiles dérober quelques richesses en compensation de ma frustration à ne pas pouvoir faire justice.
Même si j’avais revêtu pour l’occasion des habits de bonne facture, j’allais bientôt commencer à détonner parmi tous ces bourgeois et je décidai finalement de m’arrêter dans une auberge afin d’attendre la nuit. Je commandais une bière et payais ma chambre avant de manger un repas léger. Je montais ensuite rejoindre la pièce que m’avais indiqué l’aubergiste et je m’installais sur le lit, attendant que l’heure soit plus propice à une avancée discrète.
Après que le soleil soit couché, je quittais ma chambre par la fenêtre afin que ma promenade nocturne passe inaperçu et je continuai à avancer discrètement vers le quartier le plus cossu de la cité. Ce dernier était grand, mais les bâtiments étaient assez peu nombreux et il me fût facile de trouver la gigantesque bâtisse de pierre blanche devant laquelle stationnaient deux gardes arborant les emblèmes du propriétaire.
Je fis en premier lieu le tour du manoir afin d’en estimer la taille et de repérer toutes les entrées possibles. La porte d’entrée était bien entendu trop bien gardée, de même pour la porte à l’arrière, mais le balcon du premier étage paraissait non surveillé. De plus, un châtaigner poussait non loin et un saut bien effectué me permettrai peut être d’entrer. Il me faudrait me pencher sur la question durant les prochains jours.
Après cette nuit de repérage, je commençai à me pencher plus sérieusement sur les habitudes de la maisonnée grâce à diverses tenues que j’avais emportées, me permettant de ne pas trop attirer l’attention avec de multiples allers retours. J’appris ainsi les horaires des tours de garde autour de la bâtisse, des relèves des gardes, ainsi que les allers et venues des domestiques, mais surtout, je compris vite que ma cible, ne se sentant en sécurité que dans son manoir, ne le quittait que très rarement et pour des périodes de temps très courtes.
Tout était parfait, j’avais en ma possession tous les éléments me permettant d’effectuer ma tâche. Au soir du sixième jour, je décidai de passer à l’acte. Je me postai sur le toit d’un bâtiment adjacent et j’attendis que vienne l’heure de la relève de la garde, aux alentours de 2h. Je me faufilais alors parmi les ombres, grimpant à l’arbre puis sautant sur le balcon. Aucune lumière n’était visible par la porte fenêtre et j’attendis quelques secondes afin de savoir si j’avais été repéré. Voyant que ma présence n’avait pas encore été détectée, j’entrepris de crocheter la porte, tout en remerciant intérieurement Plume de m’avoir appris cet art. La serrure émit un clic caractéristique et la porte s’ouvrit sans un bruit.
L’obscurité était totale à l’intérieure du bureau de ma victime, mais ma vision dans le noir étant plutôt bonne, cela ne me gêna guère. De ce que j’avais pu observer par les fenêtres, la chambre à coucher devait se trouver dans la pièce d’à côté. Cependant, un éclat étrange dans une vitrine proche de la porte attira mon regard. Je voulu d’abord me détourner et continuer ma mission, mais je décidai finalement d’aller voir ceci d’un peu plus près.
Alors que je m’approchais, je découvris la chose la plus étrange qu’il m’ait été donné de voir. Sur une étagère de verre se trouvait une arbalète d’ivoire blanc, proche de celles dont je m’étais déjà servi à la Tanière, mais de teille beaucoup plus réduite, si bien que celle-ci pouvait aisément s’employer à une main. Sur l’étagère d’en dessous reposait l’exacte jumelle de l’arme immaculée, mais façonnée dans un ébène d’un noir profond. Alpha m’avait formellement interdit de toucher à quoi que ce soit dans la demeure, mais ces armes exerçaient sur moi une fascination telle qu’il m’était impossible, malgré toute la résistance que j’essayai d’opposer, d’empêcher ma main d’avancer plus vers la poignée de la vitrine. Cette dernière tourna sans bruit quand je la saisi et les deux œuvres d’art furent à ma portée.
Lorsque je les saisi, une chaleur étrange, comme je n’en avais encore jamais senti – j’appris par la suite que c’était la magie des armes que je sentais – m’envahit et je reculais d’un pas. C’est à ce moment précis que la porte du bureau s’ouvrit.
« - Mais que, qui êtes-v... »
La phase de ma cible s’interrompit dans un gargouillis alors qu’un carreau venait de transpercer sa trachée. Il bascula violemment en arrière quand un second le frappa de plein fouet au front.
Je regardai les arbalètes jumelles avec stupeur. Malgré le fait que chacune d’entre elles avait libéré un carreau mortel, un nouveau était apparu à sa suite.
J’avais réagi de manière réflexe et les bruits de pas pressants qui provenaient des escaliers m’apprirent que ma mission était un échec. Non seulement la mise à mort n’avait pas été travaillée, mais en plus j’avais été repéré à cause de mon non-respect des ordres que m’avait donné Alpha.
Alors que de la lumière commençait à être visible dans l’escalier, je détalai par la fenêtre encore ouverte, sautait au sol, puis me mis à courir aussi vite qu’il m’était possible de le faire. Entendant le bruit de bottes ferrées derrière moi, je disparaissais dans les ombres d’une ruelle adjacente avant de monter à l’abri sur un toit.
Ma mission était un échec. Je n’arrivais pas à retirer cette pensée de ma tête. Certes, ma cible était morte, mais dans le meilleur des cas, mon intervention allait passer pour un médiocre cambriolage ayant mal tourné et quand Alpha aurait vent de mon incompétence, il me tuerait rapidement dans le meilleur des cas. Ma raison me commandait de fuir la ville, voir le pays le plus vite possible afin de lui échapper, mais je savais très bien que je ne pourrai pas m’y résoudre. Je devais revoir Plume une dernière fois.
Je repris alors ma route vers la Tanière que j’atteignis au petit matin. L’homme à la porte me salua alors que j’entrai, ce qui fût un bon signe que la nouvelle n’était pas encore parvenue aux oreilles d’Alpha, ce qui me laissait un peu de temps. Je passai en premier lieu par ma chambre afin de récupérer quelques effets personnels, puis je me dirigeais vers celle de Plume. J’entrai sans frapper, verrouillai la porte derrière moi et me dirigeai directement vers celle que je venais voir.
Elle n’avait jamais aimé se lever tôt et elle dormait donc encore, je passais donc quelques secondes à contempler son beau visage avant de la secouer doucement.
« - Plume, j’ai fait une énorme bêtise, ma mission est un échec, je suis venu te dire adieux. »
Elle ouvrit un œil, encore à moitié endormie et me fixa quelques secondes. Un hurlement de rage mêlé de colère se fit alors entendre dans le bâtiment.
« - Amenez-le moi, et vite ! »
Plume ouvrit alors ses magnifiques yeux en grand et se mit à paniquer. Elle commença à bredouiller qu’elle allait venir avec moi, mais avant qu’elle ait eu le temps de continuer, je plaquais ma main sur sa bouche. Elle se calma alors et je parvins à la calmer. Je lui expliquai le plus vite possible que je devais partir seul, pour son bien. Des coups commencèrent à retentir sur la porte verrouillée et nous nous rendîmes compte que le temps pressait. Une larme se mit à couler le long de sa joue.
« - Dans ce cas, je vais te faire gagner du temps. Mais promets-moi de revenir un jour. »
Elle approcha son visage du mien et m’embrassa. Encore sous le choc, je lui murmurai d’une voix rauque dans laquelle pouvait facilement se ressentir les larmes qui commençaient à perler sur mes joues :
« - Je te le promet. »
Je me précipitai alors par la fenêtre ouverte avec un dernier regard en arrière qui me permit, en plus de voir une dernière fois le visage de ma bien aimée, d’apercevoir les éclats de bois qui volaient à chaque coup. Je me mis alors à prier tous les dieux pour qu’elle parvienne à sécher ses larmes avant qu’ils entrent et qu’elle puisse se sortir de la situation dans laquelle je l’avais placée sans trop de problèmes.
Je me réceptionnais habilement par une roulade et me mis à courir afin d’échapper à mes poursuivants. Je connaissais la cité comme ma poche, mais eux également, et je me rendis vite compte que si je restais en ville, je n’avais aucune chance.
Par chance, je croisai une patrouille de garde dont l’un d’entre eux – certainement leur capitaine – était à cheval. Je dégainai l’arme d’ivoire à ma ceinture et abattait sans remord un garde situé entre moi et le cheval avant de désarçonner son cavalier d’un carreau de l’arbalète d’ébène. J’enfourchais alors la monture et détalai au triple galop alors que la masse de mes poursuivants venait de s’agrandir.
D’ébène et d’ivoire, Ebony et Ivory. Les armes jumelles à ma ceinture venaient d’être baptisées.
Après une course effrénée de plusieurs minutes, je parvins finalement à quitter la ville. J’avais l’impression que plus personne ne me suivait, mais ils avaient simplement dû s’arrêter le temps de trouver des montures afin de me rattraper. Je devais trouver un endroit où me cacher quelques heures afin qu’ils perdent ma trace, puis quitter le pays. Il me fallait décider d’une direction, et vite. La frontière est était la plus proche de ma position, mais les Loups de Givre étaient très influents et j’allais certainement avoir droit à une prime sur ma tête dans les jours qui allaient suivre et ce aussi bien en Remo qu’au Togarini. L’embarquement sur un navire à l’ouest aurait été trop compliqué dans ces conditions et il m’aurait fallu me rapprocher de nouveau de la capitale, ce qui n’était pas vraiment dans mes plans. Mes seules véritables options étaient le nord et le sud-est et dans chaque cas, la frontière était plutôt éloignée. Au sud-est, j’arriverai au Bellafonte, un autre état membre de l’Alliance Azur certes, mais où l’influence des Loups était tout de même moins importante. De plus, le Lucrécio où j’avais toujours souhaité me rendre pour en apprendre un peu plus sur mes origines ne serait plus très loin et là-bas, les Loups n’avaient absolument aucune influence. Au nord, j’entrerai en Arlan, quittant ainsi l’Alliance Azur et pénétrant dans le Sacrosaint Empire d’Abel où les Loups rechignaient à pénétrer.
Ce serait donc le sud-est. Mon voyage serait certes plus dangereux, mais j’avais l’impression que je devais me rendre en ce lieu pour une raison qui m’échappait. Je partais donc dans cette direction et m’installait dans la grange d’une ferme en chemin. Malgré le fait que je me fus bien camouflé, il me fut impossible de trouver le sommeil. A cause de ma bêtise, la totalité des Loups de Givre voulait ma mort et j’étais maintenant en fuite pour survivre. La totalité ? Non. Plume me soutiendrai, son baiser me l’avait prouvé. Mon esprit se mit à dériver quand je repensais à cette seconde, peut-être la plus belle de ma vie.
D’un coup, je pris une décision. J’allais devoir voyager de par le monde quelques temps afin d’acquérir le plus de puissance possible. Je reviendrai ensuite en Remo afin de tuer Alpha et retrouver Plume. A cette pensée, mon esprit s’enflamma. Certes, cela allait être difficile, j’allais très certainement souffrir un millier de morts, mais j’allais réussir, j’en étais sûr. Je souris quand je repensais à mon choix de partir vers le Lucrécio. Ce pays était considéré comme l’un des – voir le – pays le plus puissant au monde. Je trouverai certainement là-bas de quoi obtenir ce que je cherchais, ou au moins quelqu’un qui pourrait m’indiquer où le trouver.
Le soleil était maintenant haut dans le ciel et je me décidai à me remettre tout de même en route. Les Loups ayant perdu ma trace, ils allaient certainement se mettre à fouiller toutes les bâtisses du pays. Je choisi de relâcher mon cheval, ainsi que de voyager loin de la route. Mon voyage en serait rallongé, mais je préférais ne pas prendre de risques.
Prenant toutes les précautions possibles, j’atteins au bout de quelques semaines rythmées par mes longues marches nocturnes, mes bivouaques improvisés et mes quelques vols diurnes me permettant de survivre, je finis par atteindre Du’Lucart, la capitale du Lucrécio. La cité était telle que je l’avais imaginée avec ses rues toutes aussi propres les unes que les autres et une ambiance telle que la ville donnait l’impression de ne pas connaître la pauvreté. C’est alors que je commençais à explorer la ville que je me rendais compte de la futilité de mon entreprise : comment pouvais-je donc trouver plus de puissance ? Dans une ville paisible qui plus est ? Je commençais à désespérer quand j’eu soudain un éclair de génie : la grande bibliothèque de la ville proposait un accès libre et peut être qu’au détour d’un ouvrage j’allais trouver la trace d’une légende portant sur un puissant artefact ou autre chose du genre susceptible de m’aider ? La bibliothèque serait donc le point de départ de ma quête.
Le problème étant que comme je ne savais pas vraiment ce que je cherchais, je ne savais pas du tout dans quel ouvrage le chercher. Et le nombre inimaginable de livres présents dans ce bâtiments, même s’ils étaient parfaitement classés ne m’aidait pas vraiment. C’est ainsi que je passais plus d’un mois à farfouiller nuit et jour parmi les livres de légendes, plus ou moins plausibles et de sources plus ou moins sures.
Mais un matin, alors que je décidais d’aller farfouiller du côté de la catégorie « Histoire moderne », mon regard fût attiré par un ouvrage au nom accrocheur : « La Légende de Drosgoth ». Je passais alors plusieurs jours à lire l’épais volume, me plongeant dans l’aventure de ces courageux héros qui il y a à peine plus d’une vingtaine d’années avaient parcourus des milliers de kilomètres et combattus des centaines d’ennemis afin de sauver le monde. J’étais persuadé que certains points étaient exagérés comme la résurrection de Brynn sous la forme de maîtresse du cercle de la colère, mais cela ne me touchait guère. Deux choses étaient très intéressantes dans ce récit : la quantité astronomique d’objets magiques de grande puissance que le groupe avait réussi à amasser et le fait que Sinji, l’un des derniers survivants de la bataille avait ouvert une école de combat au Lannet. Mon itinéraire allait donc être le suivant : j’allais en premier lieu me rendre au Lannet pour essayer d’étudier aux côtés de Sinji et s’il refusait – ce qui était fort probable vu que je n’étais sans doute pas le seul à avoir lu ce livre et que de plus mes capacités au combat rapproché étaient et sont toujours assez médiocres – je partirai en Albéria, là où la majorité des évènements a eu lieu, afin d’en apprendre plus sur ces artefacts. De plus, puisqu’une très longue route m’attendait, j’allais profiter de ce voyage pour perfectionner mes talents le plus possible.
Je me mis donc en route le lendemain, vers l’est, pour un périple de presque deux ans en direction des îles orientales. Je traversai successivement le Kushistan, L’Estigia, le Salazar et le Kashmir avant de prendre un bateau dans la cité de Khon Thami qui me mena vers le nord de la grande île, direction le Lannet.
Une fois sur place, après quelques jours de repos mérités pour me remettre du douloureux et long voyage en bateau, je commençais à me renseigner sur l’école de Sinji. Son emplacement ne fut pas très dur à obtenir, en effet le « Grand Maître Sinji » était une personnalité très connue et appréciée dans son pays et son école était prestigieuse. Malheureusement, un énorme problème venait entraver mon travail : la barrière de la langue. En effet, ne parlant pas un traitre mot de lannetien et le latin étant assez peu répandu dans le pays, dû aux tendances ultra conservatrices des habitants, il me fut très difficile d’obtenir plus d’informations.
Cependant, après plusieurs jours, je fis la rencontre de Kanzaki Oshimura, une lannetienne gigantesque qui – l’interprète qu’elle avait engagée aidant – me proposa de m’aider à obtenir ces précieuses informations. Ma venue dans la région n’était apparemment pas passée inaperçue et elle avait sans problème obtenu tous les détails sur ma visite. J’allais devoir rentrer dans son jeu pour pouvoir me sortir de cette mauvaise passe sans trop de problèmes. J’acceptais son aide tout en me mettant à collecter un maximum d’informations sur elle : elle était issue d’une famille noble, mais n’approuvais pas du tout les doctrines de son pays. Elle avait toutefois choisi la voie des armes et était depuis peu membre de l’armée lannetienne chargée de protéger le pays contre les assauts du Shivat, tout en faisant partie des forces tentant d’envahir ce même territoire.
Elle m’apprit que Sinji acceptait uniquement comme élèves les enfants du pays et qu’il ne ferait d’exception sous aucun prétexte. Mes craintes étaient donc fondées. Il ne me restait donc plus qu’une seule chose à tenter avant de quitter l’ile : Sinji avait comme tous les autres reçu des objets d’une très grande puissance lors de la quête pour la destruction de Drosgoth et je devais au moins voir s’il était possible d’en dérober un.
J’effectuais donc un repérage comme celui qui avait précédé l’assassinat qui m’avait valu ma fuite – tout en faisant très attention à ne pas être surpris par ma nouvelle « amie » qui, soit-dit en passant, commençait à m’ennuyer très légèrement à me suivre partout – et me rendis finalement compte que tenter une incursion dans un temple tel que celui-ci, bourré de guerriers surentraînés qui maîtrisaient des techniques surnaturelles et réussir à dérober l’un des objets que le maître gardait toujours sur lui aurait été l’un des actes les plus stupides de ma carrière de voleur.
Je me résolu donc à quitter l’île et au matin de mon départ, alors que j’embarquais dans un bateau en direction du Phaion, je fus aussi surpris qu’agacé de voir que la géante orientale m’attendait, ses bagages parés, un grand sourire aux lèvres et surtout, sans interprète. Je tentais par tous les moyens possibles de lui faire comprendre qu’elle ne pouvait pas m’accompagner, mais sans succès, son visage restant figé dans un sourire béat. La pauvre s’était surement entichée de moi et devait certainement confondre l’intérêt que je leur avais porté à elle et son pays comme de l’amour. La pauvre.
Toujours est-il qu’elle embarqua bel et bien avec moi sur le bateau, interrompant parfois le silence pesant que je m’imposais par une phrase que je ne pouvais bien entendu pas comprendre. Cette traversée, pourtant bien plus courte que celle que j’avais enduré à l’aller me parut infiniment plus longue et chacune de mes tentatives pour m’isoler se soldait par un échec. La bougre était tenace. A la fin de la traversée, je commençais à ressentir quelque chose de nouveau, que je n’avais jamais ressenti et que ne pensais jamais éprouver un jour pour quelqu’un : une simple et profonde envie de meurtre, juste pour ne plus entendre le son de sa voix.
Je pensais que notre arrivée à terre allait sonner la fin de ce calvaire, que j’allais pouvoir filer discrètement et disparaître dans la nature afin de pouvoir reprendre mon voyage en solitaire, mais chacune de mes tentatives de fuite était sabotée et accompagnée par une phrase incompréhensible. Après plusieurs jours de course poursuite qui auraient été du plus bel effet, je me résignais, et décidais d’accepter sa compagnie pour le pire… et surtout pour le pire. En effet, si la partie en solitaire de mon voyage s’était plutôt bien passée et que j’avais pu mettre à profit mes talents pour m’assurer un train de vie confortable, mon art était devenu complètement inutile une fois accompagné d’une géante parlant une langue incompréhensible et dont les poignées de deux naginatas géants dépassaient du dos. D’autant plus qu’elle n’hésitait jamais à dégainer ces armes, que ce soit pour nous défendre d’un danger qui n’existait pas ou qu’elle avait elle-même provoqué, ou encore pour nettoyer son honneur prétendument sali par quelqu’un dont elle ne comprenait même pas les paroles. Moi qui avais l’habitude de passer totalement inaperçu dans la foule, j’étais maintenant l’objet de tous les regards, et c’est de cette époque que me vient mon amour immodéré pour les capes à amples capuchons. Pour finir, comble de la honte, puisqu’il m’était devenu impossible de voler, je m’étais retrouvé à nouveau sans le sou, contraint de me laisser financer de me laisser financer par la géante.
La compagnie de Kanzaki n’avait eu qu’un seul point positif. Elle m’avait permis de comprendre à quel point je m’étais senti seul pendant ces années d’errance, sans Plume à mes côtés et elle avait ravivé mon envie de revoir celle qui m’avait permis d’aller aussi loin sans devenir fou. Le visage de ma bien aimé était devenu mon exutoire et dès que Kanzaki ouvrait la bouche – que ce soit pour baragouiner une phrase en lannetien ou pour mettre bout à bout les quelques mots de latin qu’elle avait appris – mon esprit se fermait, je n’entendais plus rien et je la revoyais, son magnifique sourire et ses yeux pétillants me permettant de surmonter cette torture mentale.
Notre traversée du Phaion fut un vrai supplice, j’ai cru perdre ma raison lors de notre périple dans les grandes plaines du Moth, puis lors de notre court passage en Hendel commença à germer dans mon esprit l’idée que le monde se porterai très certainement mieux sans elle, idée qui gagna en puissance et devient évidente alors que nous traversâmes le Goldar, tandis que divers plans aboutissant à sa disparition germaient dans mon esprit alors que nous avions passés le Dalaborn. Ces plans aboutiront finalement dans un lieu où peu de gens auraient l’idée d’aller la retrouver : à plusieurs kilomètres au-dessus du sol. Aujourd’hui encore, même si j’en ai parfois honte, je suis heureux d’avoir effectué cette sale besogne et je reste persuadé d’avoir en ce jour délester le monde d’un immense poids.
Arrivés en Alberia, ma destination – et donc par défaut celle de ma tortionnaire – nous fûtes obligés de faire une halte à proximité d’une auberge – car oui, en plus de posséder le pouvoir de provoquer d’intenses migraines à ses interlocuteurs, Kanzaki était une alcoolique chronique et si elle passait une unique journée sans avaler une pleine bouteille de saké, elle devenait encore plus invivable qu’à l’accoutumée.
Jamais je n’aurai pensé la remercier pour ça un jour, mais grâce à elle, ma quête de puissance allait prendre un gigantesque tournant. Je descendais de cheval, puis m’approchais de la porte de l’auberge. Je restais figé un court instant, puis posais ma main sur la poignée et poussais le lourd battant qui s’ouvrit, révélant devant moi les personnes qui allaient changer mon destin.
J’ouvris alors les yeux. La pénombre était tombée autour de moi et dans ma plongée au cœur de mon passé, je m’étais endormi, au même endroit qu’il y a fort longtemps. Je me relevais lentement, retirais la poussière qui parsemait mon dos, puis m’étirais, maudissant l’atroce dureté de ce que certaines personnes avaient un jour osé appeler un lit. Je pris quelques secondes afin de reprendre mes esprits. Il ne servait plus à rien de rêver. Après avoir traversé les mondes à sa recherche, Plume m’avait trahie. D’une seule flèche dans le dos, elle m’avait fait comprendre que rien ne redeviendrai jamais comme avant. Peu importe, les choses ont effectivement changées. Si nos chemins se croisent à nouveau, je n’hésiterai pas. Sache que tant que tu seras une menace pour les miens, tu pourras le risque de recevoir une balle en pleine tête sans aucun avertissement. Les choses ont changées, je suis libre à présent. Et Elle est là pour me guider."